La fragilité de nos droits et le renversement de Roe contre Wade
29 June 2022
Une deuxième fois ce mois-ci, Action ontarienne contre la violence faite aux femmes (Action ontarienne) ressent le besoin de commenter comme tant d’autres l’actualité américaine. Si le renversement de l’arrêt Roe contre Wade (droit à l’avortement) par la Cour suprême des États-Unis était attendu depuis un moment, la nouvelle demeure bouleversante. Elle place les femmes américaines face à une grande inégalité en fonction de là où elles habitent : certaines y auront accès alors que d’autres non. Cette décision touche aussi de façon disproportionnée les personnes vivant dans la pauvreté ou en milieu rural parce qu’elles n’auront pas l’option de voyager vers un autre État pour se faire avorter. Soyons aussi très claires : les avortements continueront de se faire, même dans les États qui choisiront de l’interdire. Cependant, le risque de blessures graves et le taux de mortalité augmenteront, parce que les avortements ne seront plus sécuritaires. C’est une décision mortelle, ni plus ni moins. (Parenthèse : Les agresseurs d’Anita Hill et de Christine Blasey Ford font partie des juges ayant témoigné en faveur de cette abolition.)
Notons l’absurdisme et l’hypocrisie : même si tant de personnes anti-choix prônent l’accouchement forcé en prétendant vouloir défendre les droits des « enfants à naître » (remarque : une grossesse de quelques semaines n’est pas un enfant), ces personnes ne revendiquent pas de garderie universelle, de soins de santé maternelle et néonatale, d’éducation sexuelle, de contraception accessible ou de réduction du taux élevé de mortalité de mères qui accouchent aux États-Unis.i Ce n’est pas une coïncidence; c’est parce que cette soi-disant défense des droits n’est qu’un prétexte pour contrôler le corps des femmes et de toutes les personnes pouvant être enceintes.
On ne devrait pas avoir à le faire, mais rappelons que :
- L’avortement est un soin de santé.
- L’avortement est légal au Canada, mais l’accès est fragmenté, et nous met en danger. Les Nations Unies ont noté en 2016 les disparités au pays.ii
- Toute personne doit avoir l’autonomie sur son propre corps, et sa valeur ne peut pas être calculée en fonction de ses appareils reproductifs. Nous valons bien plus que ça.
- Les hommes en pouvoir devraient protéger nos droits, et non décider en notre nom.
- Les avortements se poursuivront aux États-Unis, mais plus en mourront.
Par ailleurs, soulignons aussi qu’un juge conservateur veut aussi revenir sur les droits des personnes 2SLGBTQIA+ et l’accès à des moyens contraceptifs.iii Ce que nous observons est une atteinte flagrante aux droits de la personne, par le plus haut tribunal du supposé pays le plus développé du monde.
Ces faits seuls inquiètent. Nous ne sommes pas rassurées que la situation soit « bien meilleure ici », car nos droits ne sont jamais garantis, ni ici ni ailleurs. Que voulons-nous au Canada? Pour commencer, nous voulons que le Parti conservateur du Canada cesse d’accorder des plateformes à des députés et députées anti-choix et que le débat sur l’avortement cesse de ressurgir dans leurs rangs. Avec l’élection prochaine de leur prochain ou prochaine leader, le parti est en quête d’identité, et nous sommes inquiètes que le parti se range plus vers la droite pour ce type d’enjeu. Par ailleurs, nous revendiquons qu’aucun professionnel et professionnelle de la santé ne puisse refuser d’accorder des avortements sous prétexte de conflit moral ou religieux. Nous voulons qu’au-delà des protections légales, l’avortement soit réellement accessible, gratuit et sécuritaire partout au pays.
Action ontarienne défendra toujours le droit à l’avortement et à une pleine autonomie corporelle et s’opposera à toute possible ingérence politique. Notre fureur alimente notre lutte pour nos droits.
[1] https://digitallibrary.un.org/record/3802136?ln=en
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